Publié par : Eric Bondo | 2 septembre 2015

Le partage.

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Dans la foulée de mon entreprise de toujours poursuivre à partir de mon dernier billet, lequel portait sur le taux exorbitant d’analphabétisme au Québec ET l’hypothèse d’un grand chantier social d’alphabétisation, un grand, gros, des dizaines de milliers de personnes et/ou un logiciel, dvd, application, distribuable à grande échelle, commandité par l’État. On se dit, genre, on alphabétise 1 million de personnes par année. Je dis l’État, ou quiconque a le temps, le leadership et l’envie de s’y lancer -je les salue déjà-. Personnellement, je trouve ça énorme, et j’me connais, je file pas trop trucs énormes dans ma vie. Pour l’instant. Ça restera dans mes projets, si c’est pas fait d’ici à ce que ce soit en première place de ma liste de trucs énormes à faire. Mais si ça vous tente, ce serait génial. Quelques partages, un kickstarter s’il faut, un cours de lecture fait de clips et d’éxercices dernier cri. Y a moyen de faire quelque chose. Y a peut-être même déjà plein de trucs qui existent, disponibles sur le Itune Store ou le Google Play machin. Ensuite, une page facebook ou vous invitez les gens à partager leur compréhension de la lecture et à ceux qui ne savent pas lire à chercher un mentor ou une app/dvd/bla. Voilà pour les volontaires.

Je reviens à un mot d’une importance cruciale, en fait qui définit le 21è siècle. Bien sûr, on en est à nos premiers balbutiements (20 ans d’ère internet, c’est peu dans l’histoire humaine), mais ce mot, partage, est ce qui, à mon avis, définit l’ère dans laquelle nous nous trouvons. Chaque site, chaque vidéo, chaque publication que nous parcourons sur la toile, disposent d’une ou de plusieurs fonctions de partage, chacune attirant par résonance d’autres à venir voir ce qui s’y trouve. Ainsi, une nouvelle banale ou de grande importance se retrouve projetée et re-projetée dans l’inconscient collectif artificiel, par un simple clic. Jamais autant d’information n’a été aussi instantanément et mondialement partagée dans l’histoire. Ça peut sembler banal parce qu’on baigne dedans, mais quand on y pense. Il y a vingt ans, les gens s’envoyaient des lettres qui prenaient au minimum des jours à se rendre à destination. Où ils s’appelaient au téléphone à des heures ridicules parce que les interurbains coûtaient une beurrée. Maintenant, ils paient -ou même pas- une cinquantaine de billets par mois et peuvent se parler face à face en direct. Où s’envoyer des liens, des fichiers immenses, des longs messages, instantanément. C’est à peine si le message ne part pas avant qu’on l’envoie.

Dément. Ça sonne presque cheezy, mais on est dans l’époque du partage. Fuck les références religieuses, le partage est devenu laïc, et universel. Pour l’instant, c’est surtout de l’information, mais aussi à d’autres niveaux, dont l’économie, avec des gens qui promeuvent le modèle open source, avec entre autres Elon Musk, le mec de Tesla motors, qui rend disponible et utilisable certains de ses importants brevets, pour que d’autres l’imitent.

On l’a vu avec les différentes commissions d’enquête, on l’a vu avec les histoires de Wikileaks, de la NSA qui épiait pas mal de monde et même avec l’histoire d’Ashley Madison, on peut remarquer que jusqu’à il n’y a pas si longtemps, nous vivions dans une ère de secrets. Secrets d’État, secrets intimes. Le nouveau siècle est en train de faire éclater l’ère du secret. Bien que relativement superficiels dans la majorité des cas, l’abondance de partage transforme radicalement le paradigme collectif.

Bien sûr, il reste des secrets. Il en restera probablement toujours. À titre personnel, je trouve que les secrets, surtout ceux qui sont sombres, sont encombrants. Dans le fond, quand quelqu’un vous en confie un, c’est pour s’alléger la conscience. Et c’est celui qui se le fait confier qui porte le fardeau -ou une partie- par la suite. Une chance qu’il existe des professions qui assurent au secret professionnel. Plate, qu’elles soient sous-utilisées. Le partage est associé à la transparence, celle entre les institutions et les individus, celle entre les individus eux-mêmes. Les populations l’exigent, les gouvernements rechignent.

Quand j’ai commencé à travailler dans les bars, une des premières choses que l’on m’a dites qui m’a profondément marqué était : Dans le milieu, tout se sait, tout finit par se savoir. Bien vrai, l’alcool fait parler.

Aujourd’hui, notre civilisation se retrouve face à ce constat. À l’ère d’internet et des réseaux sociaux, tout semble finir par se savoir. Le danger, devant cette progression constante vers plus de transparence, c’est qu’elle demandera plus d’empathie, plus de compassion. Dans le fond, quand on réprime des secrets, c’est surtout par peur d’être jugé. Mais devant une personne empathique et empreinte de compassion, le secret peut être confié sans crainte, et la libération qui suit est fascinante. On aime bien dramatiser avec nos trucs, et parfois, quand on arrive à partager un secret qui nous pèse, et que l’autre nous regarde en nous disant : y a rien là (en tout cas, c’est ce que ça me fait), à moins d’être trop attaché à notre drama, c’est totalement réconfortant. Le partage nous sort du paradigme de l’individualisme pour nous entraîner vers une plus grande conscience sociale, inter-relationnelle.

Cette histoire humaine, avançant à pas de tortue, évolue maintenant à pas de géants, tout ça à cause du partage. Je l’ai déjà dit, ce qui est bon pour la collectivité l’est aussi pour les individus, et vice-versa.

Continuons de partager. Plus, même.


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